Le village de Boësse par la classe de Monsieur Piedallu


Monsieur Ernest Piedallu, qui fut un professeur de français exceptionnel au collège de Puiseaux, m'a remis ce petit document  qu'il avait fait avec ses élèves, alors qu'il était instituteur.
Merci à vous Monsieur et Madame Piedallu, dont le souvenir est dans mon coeur.

Boësse est bâti sur le bord d’un coteau qui domine la plaine de Beaumont à Montargis.
Il est situé dans le Gatinais Beauceron.
Il fait partie du canton de Puiseaux, de l’arrondissement de Pithiviers.
La commune s’étend sur 1300 hectares environ. On cultive des céréales, des betteraves, du tabac, des asperges et encore quelques vignes.
La population actuelle s’élève à 402 habitants, elle est stationnaire depuis une quinzaine d’années, mais elle fut en 1859 bien supérieure car elle atteignait 941 habitants. Depuis, elle a baissé régulièrement.
Presque toute la population est rassemblée au bourg.
Les rues étroites et tortueuses sont bordées de maisons dont certaines, abandonnées, tombent en ruine.
Des origines des Boësse à 1600
Le nom de Boësse vient du latin –buxia- lieu planté de buis. Boësse a du être un village gaulois, gallo-romain avant de subir les invasions.
On ne possède aucun document sur ces époques. A l’époque féodale, Boësse comportait trois seigneuries : de Crannes, d’Aulnay et de Boësse.
Il existait trois châteaux :
Le château de Crannes, forteresse et maison royale de Louis VI le Gros vers 1120 et détruit à la fin du XVIème siècle. ( On ne trouve plus à son emplacement que des pierres et la trace d’un fossé).
Le château de Boësse qui fut entièrement reconstruit par la famille Descourtiz.
Le château d’Aulnay qui fut reconstruit en grande partie mais qui conserve encore une tour féodale, appelée tour de Montmorency et deux fossés remplis d’eau.
Le bourg de Boësse était « muré » avec une ceinture de fossés et des portes. Ces portes sont aujourd’hui comblées ; néanmoins les noms sont restés : Porte de Puiseaux, Porte de Bourgogne, Porte du Chafaud où se trouvait probablement la potence seigneuriale.
Les maisons étaient construites le long des rues très étroites, tortueuses, qui n’ont guère changé depuis ce temps là. De ces maisons de torchis et de paille, il ne reste rien.
De cette époque datent de nombreux souterrains qui devaient servir de cachettes et réunir les châteaux de la région et même la plupart des maisons.
On peut citer sous la cour de Monsieur Vergnes, une salle d’où partent quatre souterrains dans les directions de Beaumont, Bromeilles, Gaubertin et Givraines.
Sous la rue près de la boulangerie se trouve une chapelle avec des piliers et une voûte ogivale.
Ces souterrains sont pour la plupart murés. Il faut signaler également un établissement religieux, qui occupaient le Nord Ouest du village.
Une maladrerie (village où vivaient des Lépreux) était située au pied de la Montagne,  à la limite du territoire d’Echilleuse.
De 1600 à 1789
Les registres paroissiaux donnent sur cette époque des renseignements sur les baptêmes, les enterrements et les mariages.
Si les naissances étaient très nombreuses (25 à 30 par an), le nombre des décès était parfois bien supérieur, en particulier la mortalité était très grande chez les enfants.
En 1652, 91 enterrements eurent lieu à Boësse dont 25 au mois de septembre et dans ces 25, il faut compter 17 enfants jusqu’à 13 ans.
Barthélémy Arnoul perdit 3 enfants en 3 mois.
Cette année là, durant la Fronde, les armées des princes ravageaient la région de Puiseaux : peut-être avaient-elles propagé une épidémie.
Citons que le premier juin, 4 fillettes furent tuées par la foudre dont 2 sœurs de  8 et 10 ans.
Parmi les familles nobles ayant eu des propriétés ou des droits seigneuriaux à Boësse durant cette période, il faut noter la famille de Harlay et surtout la famille de Montmorency Luxembourg.
Le maréchal de Luxembourg en dehors d’une trentaine de titres de noblesse possédait celui de Prince de Tingry et comte de Beaumont.
Il possédait des droits seigneuriaux sur presque tout le territoire de Boësse.
L’une des princesses de Montmorency qui vécut longtemps à Beaumont fut célèbre par sa charité et fonda l’hospice de Beaumont auquel elle abandonna des terres. ( La Dame, l’Orme à la Dame)
Sous la révolution
Le 1er mars 1789 le curé prévient les habitants de Boësses par une lettre lue en chaire que la rédaction des cahiers de doléances aurait lieu le 14 Mars.
Ce jour là,  après la messe, les habitants se réunissent devant la grande porte de l’église et remettent le cahier de la paroisse de Boësse à Monsieur Aussenard, lieutenant du duché de Beaumont.
Ils y réclamaient : la liberté individuelle – l’abolition des lettres de cachet – la liberté de la presse- l’égalité devant l’impôt – l’abaissement des frais de transports- la suppression des commis aux aides et de la gabelle – la répression des dégâts causés par le gibier et les pigeons – la réparation du clocher de l’église.
Au début de l’été 1789 le tocsin rappela au village tous les hommes et les femmes qui travaillaient dans les champs.
Pourquoi avait-il sonné ? personne ne le sut, on avait sonné à Boësse parce que le tocsin sonnait dans tous les villages.
C’est par des voituriers de Paris qui menaient du vin à Paris qu’on apprit à Boësse la prise de la Bastille. Peu de temps après on fut informé de l’abolition des privilèges.
Lorsque la France fut divisée en département, Boësse demanda à faire partie du canton de Puiseaux tandis que Beaumont demanda sa réunion à la Seine et Marne. En 1790, on célébra la fête de la Fédération. Le prêtre fit la messe en plein air ; on tira un feu d’artifice et également des coups de canon. Mais en mettant le feu à la pièce, le servant incendia une maison voisine et tout un quartier de Boësse flamba.
Boësse suivit le mouvement révolutionnaire ; on y fonda une garde révolutionnaire, comme en témoigne un acte de décès de 1791 : « Le 20 février, fut enterré Joseph Houy, âgé de 37 ans, fusilier de la garde nationale formé en la paroisse de Boësse, assisté de son escouade composée de 8 hommes ». L’acte de décès est signé E Richardeau tambour- Mignerot fourrier – Lenoble instructeur.
La proclamation de la République en 1792 amena des changements dans la tenue des registres de l’état civil.
Le dernier acte fait par le curé Robert est un baptême du 1er Décembre 1792.
«  Le 9 décembre 1792, an premier de la République, les registres sont remis au maire et aux officiers municipaux qui en auront la charge ».
Mais le 13 décembre, c’est le maire et « le citoyen curé de Boësse » qui font un baptême ; le 20 décembre, le maire enregistre une naissance, mais il n’est plus question de baptême et le curé n’a pas signé.
Au cours de l’année suivante de nombreux actes d’état civil furent raturés car le greffier avait des difficultés avec le calendrier républicain.
A la nouvelle de l’exécution de Louis XVI, les révolutionnaires de Boësse interdirent le culte dans l’église et y firent des réunions et des banquets. On y chantait et on y dansait.
Quelques jours plus tard, les plus enragés décidèrent d’aller attaquer le château de Beaumont car le prince de Tingry avait émigré. Les portes et les fenêtres en furent brisées, les papiers concernant les privilèges et les titres furent ramenés à Boësses et brûlés sur les fossés au accents de la Carmagnole.
A cette époque deux des cloches de l’église furent réquisitionnées et fondues pur en faire des canons.
A partir de 1795 la population se calma et la tranquillité revint à Boësse.
Sous l’Empire
Un des premiers actes de la municipalité sous l’Empire fut d’interdire les réunions et les jeux dans l’église. Le maire alla même jusqu’à ordonner la fermeture des auberges durant la messe.
Au sénat consulté pour l’établissement de l’Empire il y eut 104 « oui » et à peu près autant de « non ». Les habitants étaient loin d’être d’accord.
On fêta la naissance du roi de Rome le 24 mars 1811.
Mais en 1814, ce fut l’invasion de la France : les Cosaques et les Prussiens passèrent à Boësse et occupèrent le village durant plusieurs semaines.
L’Empire fut regretté par une partie de la population, si bien qu’en 1817 : « Jean Percheron et Vincent Naudin «  furent arrêtés pour avoir crié : « Vive l’Empereur au passage du curé de Beaumont ».
De 1815 à nos jours
La révolution de 1830 passa presque inaperçue à Boësse, si ce n’est que les jeunes gens hissèrent un drapeau tricolore sur le clocher, en tirant des coups de fusil qui mirent le curé en émoi.
En 1848, on planta un arbre de la liberté sur la place. Lors du coup d’état du décembre 1851, deux habitants, Fauve et Jourdain furent arrêtés comme républicains et emprisonnés.
La guerre de 1870 ramena les armées prussiennes à Boësse. Et ce furent déjà les réquisitions de grain, de bestiaux, surtout lorsque la bataille de Beaune la Rolande eût permis aux ennemis de s’installer définitivement dans la région.
La guerre de 1914 causa de nombreuses pertes parmi les hommes du village et celle de 1940 à 1945 vit se renouveler les réquisitions de 1870-1871 , mais sur une bien plus grande échelle.
L’église
L’église est le plus ancien monument que Boësse ait conservé.
Elle est consacrée à Saint Germain.
Elle fut construite au XI ème siècle et remaniée plus tard.
La tour de l’église s’effondra en partie en 1817 et on la remplaça par un clocher qui s’élève à 38 mètres.
Elle comporte trois nefs égales avec des piliers ronds surmontés de chapiteaux qui supportent des voûtes en ogive basse.
Un narthex curieux abrite la porte principale, il occupe toute la largeur du pignon ouest et ressemble à une galerie de cloître.
Il comprend trois portes en plein cintre, on compte cinq ouvertures romanes d’un côté de la porte principale et six de l’autre.
Ces ouvertures sont séparées par des colonnettes surmontées de chapiteaux décorés de façon très simple : grappes, pampres, l’un d’eux est ornés de deux têtes : peut-être Saint Germain ?
L’intérieur est assez sobre et tous les vitraux sont en mauvais état.
On peut citer à l’intérieur, deux ou trois tableaux et un Chemin de Croix offert par l’impératrice Eugénie.
Le cimetière, autrefois, était contigu à l’église, il a été transféré à la sortie du village.

L’école de Boësse
C’est sur un registre de 1641 que l’on trouve la signature de « Johan Gilllaume, maistre des Ecoles » peut-être y eut-il déjà d’autres maîtres avant lui.
L’école se faisait dans une salle près de l’église et le maître était de toutes les cérémonies religieuses, sonnant les cloches et servant la messe.
A la révolution, Denis Lesseurre maître d’école devint greffier de la commune et fut chargé de tenir les registres de l’état civil.
L’école actuelle date de 1869, elle ne comportait alors que deux classes et c’est vers 1892 que la municipalité fut obligée de créer « une salle d’asile » à cause du grand nombre d’enfants